Les repas trop riches peuvent induire une certaine somnolence, durant la digestion. Chez les mouches aussi, démontre cette recherche du Scripps Institute qui constate qu’une teneur plus élevée en protéines et en sel dans nos aliments, ainsi que le volume de nourriture consommé, sont les principaux responsables de cette somnolence digestive. Les scientifiques de l'Institut de recherche Scripps parlent même de « comas alimentaires », chez la Drosophila melanogaster. Ces chercheurs ont pu développer un système capable d’évaluer à la fois les comportements de sommeil et d'alimentation de ces mouches et constatent, finalement, le même comportement chez l’insecte que chez l’Homme : les mouches dorment plus longtemps après un gros repas.
Cette interaction entre le sommeil et le métabolisme a d'ailleurs déjà été documentée chez l'animal, rappellent les auteurs : des mouches affamées vont réduire leur sommeil ou augmenter leur activité. « Cependant, les effets aigus sur le sommeil d'une consommation alimentaire accrue n'avaient encore jamais été étudiés, en particulier en raison de l'absence de méthode pour y parvenir », précise l'auteur principal, William Ja, professeur agrégé au département du métabolisme et du vieillissement du Scripps. Pour mieux comprendre cette relation, l'équipe a développé l'Activity Recording CAFE ou ARC, le premier système permettant un suivi visuel de la consommation alimentaire et du mouvement des mouches (Visuel ci-contre). Les enregistrements du comportement des mouches des fruits à partir de ce dispositif révèlent que, après avoir mangé un repas, les animaux dorment plus avant de revenir à un état normal de veille. La période de sommeil dure généralement environ 20, à 40 minutes avec les plus grosses portions.
Quels nutriments modulent le sommeil après le repas ? L'équipe constate, par tests, que seules les protéines et le sel sont des facteurs de somnolence post-pandriale. En recherchant le mécanisme neuronal en cause, à l'aide de techniques génétiques permettant d'activer et de désactiver les neurones dans le cerveau de la mouche, l'équipe identifie un certain nombre de circuits qui jouent un rôle dans le contrôle de cette somnolence. Une précédente étude avait montré que des neurones spécifiques, les neurones de la leucokinine sont impliqués dans la régulation de la taille des repas, ce qui indique que ce système agit rapidement pendant l'alimentation pour signaler un changement de comportement.
Le rôle clé du système Lk : en s'appuyant sur ces travaux, l'équipe démontre également le rôle du système Lk dans le sommeil post-pandrial : ce sous-ensemble de neurones du récepteur de la leucokinine (Lkr) s'avère nécessaire pour initier le sommeil post-repas, en présence de protéines spécifiquement. D'autres circuits cérébraux impliqués dans l'horloge interne, influent également sur la somnolence post-repas. En conclusion, cette somnolence « digestive » semble régulée par de multiples voies, ou cibles en puissance.
D'autres recherches ont pour objectif de découvrir les gènes exacts et les circuits qui permettent à la taille des repas, aux protéines et au sel de favoriser le sommeil.
eLife Nov 2016 DOI: 10.7554/eLife.19334 Postprandial sleep mechanics in Drosophila
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